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 Bilan sur les mutations de la conservation-restauration en Europe - Gaël de Guichen

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AuteurMessage
françoise
Admin
françoise


Nombre de messages : 808
Date d'inscription : 14/03/2008

Bilan sur les mutations de la conservation-restauration en Europe - Gaël de Guichen  Empty
MessageSujet: Bilan sur les mutations de la conservation-restauration en Europe - Gaël de Guichen    Bilan sur les mutations de la conservation-restauration en Europe - Gaël de Guichen  EmptyDim 24 Oct 2010 - 7:40

Lors de la journée d’étude « Actualité des pratiques de la conservation-restauration en France et en Europe »*, M. Gaël de Guichen présenté une communication intitulée « Bilan sur les mutations dans le domaine de la conservation-restauration en Europe ». Cette intervention, tout comme celles qui ont suivi, a été publiée au deuxième semestre 2010.
C’est avec l’autorisation de l’éditeur, FAGE EDITIONS – que nous remercions vivement – que nous mettons en ligne sur ce forum la première partie du texte de M. de Guichen.
Ce bilan et les questionnements qu’il soumet paraissent indispensables à ce stade de l’évolution de la conservation-restauration ; il est à lire, réfléchir, débattre, et ce par tous les acteurs de la préservation du patrimoine.

Pour lire la suite de la communication de M. de Guichen, il suffit de commander les actes de la journée d’étude à :
Fage Edtions
3, rue Camille Jordans
69001 LYON
Tel : 04 72 07 70 98
Mail : fage.editions@free.fr
Prix : 15 €

* Journée d’étude organisée par l’AGGCPF PACA et la délégation FFCR PACA
Sous la responsabilité de Lucienne Del’Furia et Thierry Martel
Jeudi 15 octobre 2009
Marseille – Auditorium du Musée d’Histoire



BILAN SUR LES MUTATIONS DANS LE DOMAINE DE LA CONSERVATION-RESTAURATION EN EUROPE
Gaël de Guichen

Je vous remercie de votre invitation et de votre accueil. Je voudrais vous dire que, retraité de l’ICCROM où j’ai œuvré pendant trente ans, je suis encore sollicité pour des interventions. Je n’y réponds pas toujours positivement car les sujets proposés ne rencontrent pas forcément mon intérêt actuel. Je suis très heureux de votre invitation ici à Marseille car elle émane de deux domaines de compétence – la conservation et la restauration – qui m’ont passionné et me passionnent encore. Mon intervention porte sur les relations nécessaires entre les professionnels afin que leurs interventions conjuguées sur les collections soient efficaces, ce qui suppose une réflexion sur les définitions lexicales et sur les objectifs à atteindre ensemble.
J’aimerais tout d’abord vous identifier. J’ai vu que vous veniez de différents points de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, mais je voudrais
savoir :
Qui, parmi vous, est conservateur ? [Cinq personnes lèvent le doigt.]
Qui, parmi vous, est restaurateur ? [La majorité des présents lève le doigt.]
Qui, parmi vous, est scientifique, je précise, dans les sciences exactes, physique, chimie, biologie ? [Personne ne lève le doigt.]
Qui fait autre chose ? [Trois personnes venant d’Arles et de Draguignan se signalent, ainsi que le groupe des étudiants de l’École d’Avignon.]
L’absence de scientifiques m’attriste mais ne me surprend aucunement car le thème de cette journée de travail n’intéresse pas les scientifiques, ils préfèrent l’archéométrie. Nous en reparlons plus tard.
En théorie, trois types de spécialistes ont une responsabilité plus directe sur la conservation et la restauration des collections :
• le conservateur du patrimoine
• le conservateur-restaurateur
• le scientifique (physicien, chimiste, biologiste…).
Ils forment ce triangle idéal qu’on évoquait en 1970. À cette époque, après avoir été ingénieur responsable de la grotte de Lascaux, j’ai été appelé à l’ICCROM afin de lancer un cours sur les principes scientifiques de la conservation – cours qui s’adressait justement aux conservateurs, aux scientifiques et aux restaurateurs quel que soit leur statut.

J’insiste sur cette notion de statut. En effet, si en Angleterre, par exemple, les restaurateurs étaient le plus souvent des fonctionnaires, en France, ils venaient du secteur privé. Par ailleurs, en Angleterre, le département de conservation des grands musées est parfois dirigé par des restaurateurs, ce qui donne à ces derniers la possibilité de discuter d’égal à égal avec leurs collègues qui sont conservateurs. La collaboration entre les trois spécialistes est d’autant plus aisée que tous les composants du triangle que j’évoquais sont au même niveau. Ce qui n’est pas
le cas en France.
Dans les années 1960 ont été créés des laboratoires scientifiques comme, par exemple, le laboratoire du Musée du Louvre, devenu par la suite le C2RMF. L’arrivée des physiciens, chimistes, biologistes a laissé un moment espérer que ceux-ci allaient fournir des solutions aux problèmes posés par la conservation et la restauration. Reconnaissons que beaucoup de ces problèmes n’étaient pas faciles à résoudre et soulignons que les scientifiques n’avaient reçu ni la formation et encore moins la spécialisation pour répondre aux questions qui leur étaient posées.
Pour sauver la face, 80% des scientifiques se sont dirigés vers l’archéométrie (connaissance du passé de l’objet) et ont abandonné la conservation-restauration (présent et futur de l’objet). Ceci explique l’absence constatée des scientifiques dans cette salle. En ce moment, ils dialoguent avec leurs instruments.
Ainsi, un des trois partenaires s’étant retiré du jeu, seuls se retrouvent face-à-face le conservateur et le conservateur-restaurateur1, dans une « confrontation » plus ou moins violente selon les caractères et les contextes.
Il serait important de passer du stade de la confrontation, trop fréquente, au stade de la collaboration, qui facilite le travail de tous et garantit la bonne réalisation des tâches.
Regardons cette statuette [fac-similé d’une statuette d’enfant en argile, provenant de fouilles anciennes dans le canal des Arsenaux à Marseille] : c’est cela qui nous réunit, c’est l’objet, c’est la collection, rien d’autre.
Probablement nous comprendrions-nous mieux si nous nous réunissions autour de l’objet, si nous nous concentrions dans un travail d’équipe autour des collections.


I. Travail de groupe ou travail d’équipe
Pour qu’il y ait collaboration, il faut qu’il y ait un travail d’équipe, je dis bien d’équipe, pas de groupe.
Il y a une différence entre groupe et équipe. Ici, dans cette salle, nous sommes un groupe. Voici deux illustrations d’équipes. Regardez la photo d’une équipe de rugby : certains joueurs sont en pleine action, d’autres ne font rien et cela peut surprendre. Regardez la photo d’un orchestre symphonique : certains jouent, d’autres attendent tranquillement leur moment. Dans les deux cas, en fait, il y a du temps pour chacun, chacun est à sa place en fonction de ses compétences, de son poste, de sa mission. Chacun tour à tour est actif, mène le jeu, capte l’attention, ou bien patiente, ou se détend.
Dans les deux cas, tous obéissent à un chef reconnu, tous respectent une règle, tous sont dans la même contrainte de rythme ou de temps. Et personne ne s’offusque ni ne déroge. La force de l’équipe réside dans sa cohésion.
Une équipe, c’est d’abord un objectif commun qui sera écrit en commun suite à une réflexion portée sur chaque mot.
Cette équipe se fonde sur sept principes :
1. Un objectif commun ;
2. Le respect de l’autre
(personne ne sait tout, mais sait à qui faire appel et quand) ;
3. Le rôle défini de chacun et reconnu par tous ;
4. La gestion commune du temps ;
5. Un langage commun ;
6. Une culture commune ;
7. Un responsable reconnu par tous.

Dans toutes les équipes gagnantes, on applique ces principes, sinon c’est l’échec. Si, oubliant l’objectif commun, chacun veut tirer la couverture à soi, il est à peu près certain que l’objectif ne sera pas atteint. Dans notre cas, l’objet ne sera pas traité convenablement.
Pour apprendre à travailler ensemble, il faut du temps et, malheureusement, on ne se donne pas le temps pour y parvenir.

Quel est l’objectif commun de la conservation et de la restauration ?
Quand on interroge les uns et les autres, on obtient des réponses très diverses. En fait, on se fixe surtout sur le comment, et on oublie le pourquoi. Dans la majorité des cas, l’objectif commun n’est pas clairement exprimé. Certains veulent sauvegarder l’état d’un objet, mais sans prendre en compte son message.
D’autres donnent priorité au message et en oublient la condition physique. L’objectif suivant tient compte des deux positions :
À travers la Conservation et la Restauration, nous cherchons à assurer que les oeuvres soient en aussi bon état que possible et que les messages qu’elles contiennent soient transmis au public et aux spécialistes d’aujourd’hui et de demain.
Introduire la notion de public d’aujourd’hui est très important, car conserver pour le seul public de demain faciliterait énormément le travail. Il suffirait de tout mettre sous clé en réserve et de contrôler les conditions générales. Tout change et se complique lorsque l’on doit aussi tenir compte du public d’aujourd’hui avec les expositions temporaires, les transports, les visites scolaires, les visiteurs handicapés, les chercheurs, etc. Et c’est cet aspect de notre travail qui intéresse les responsables politiques : c’est le public d’aujourd’hui qui les intéresse et c’est au nom de ce public que l’on va pouvoir solliciter leur appui. Si l’on cible uniquement le public de demain, l’appui des politiques n’est pas acquis. Cette réflexion sur les objectifs des politiques est importante dans le dialogue nécessaire à établir avec eux, et l’argumentation doit être claire et pertinente. Je le répète : transmettre aux générations de demain, c’est aisé. Il est plus complexe de travailler à la fois pour le public d’aujourd’hui et pour le public de demain. Il est beaucoup plus facile de fermer la grotte de Lascaux que de l’ouvrir aux visiteurs.

Il est temps maintenant de faire connaître votre opinion sur ma proposition d’objectif. Vous avez tous reçu un carton rouge et un carton vert. En effet, jusqu’à Rome où j’habite, est parvenue la rumeur de cette tendance à la démocratie participative. Il est donc temps de vous exprimer. [La salle se couvre de cartons verts. Une seule personne n’est pas d’accord, estimant que l’on transmet toujours pour le futur, même s’il s’agit d’un futur proche.]
David Cueco : Je suis profondément d’accord avec l’objectif, mais un terme fait question, celui de « message »; est-ce l’intention ? la signification ?
Gaël de Guichen : On peut parler de signification. Certaines personnes utilisent le terme de « valeur », inspiré de l’anglais « value ». Je suis réticent à l’utiliser car le terme « valeur » induit une valeur monétaire, et cela ne peut être le cas pour les collections publiques. J’aime le mot « message » que j’ai entendu utiliser pour la première fois par Monsieur France-Lanord.

[Intervention dans la salle : Plutôt que le terme « transmettre », peut-on utiliser plutôt « rendre accessible » ?]
Gaël de Guichen : On peut parler de rendre accessible si l’on entend la signification profonde et pas seulement l’aspect physique. Je reviens d’Ouro Preto au Brésil. J’ai été frappé que dans l’école de restauration les statues et les tableaux de saints soient donnés à restaurer, dans la mesure du possible, à l’élève portant le prénom de ce saint, et sur le mur, il est écrit : « Une société attribue au conservateur-restaurateur la charge des biens culturels, ce qui exige un grand sens de responsabilité morale, ainsi que celui de la responsabilité vis-à-vis du propriétaire ou du responsable légal, vis-à-vis du public et de la postérité. »
Cette sentence me semble très importante et très pertinente. Elle positionne d’emblée le rôle social des conservateurs-restaurateurs, alors qu’on oublie souvent pourquoi on fait ce travail. Or, si on l’exerce, c’est bien pour transmettre un message contenu dans une forme.
À l’opposé, je me souviens d’une visite dans un atelier de restauration de documents graphiques. On me présente la photo d’une lettre de Garibaldi, arrivée complètement déchirée et chiffonnée – et la même lettre après intervention. Quand je demande ce que dit cette lettre, aucun des conservateurs-restaurateurs n’est capable de me répondre. Or, ils ont été trois à travailler sur ce document pendant plusieurs semaines : aucun d’eux ne s’est préoccupé de son contenu.

Ceci est beaucoup plus fréquent que l’on ne croit. Non seulement on oublie pourquoi on travaille, mais en plus on oublie sur quoi l’on travaille. Chacun se replie sur sa technique, prononce des conférences entières, multiplie les publications, les Actes… sans aucune illustration. Prenons l’exemple de la revue (mythique) de la profession, Studies in conservation.
Qui la reçoit ? 2 500 personnes. Qui la lit ? 200 personnes. Qui la comprend ? 10 personnes ! Cela vous fait rire, mais c’est la réalité. On se gargarise de mots ; en témoigne, prise parmi tant d’autres articles similaires, telle contribution sur le dessin à la pointe d’argent : pas un dessin n’y est reproduit, il n’y a que du texte.
On se complaît avec l’imagerie scientifique… Regardez des images au microscope à balayage électronique. Elles vous impressionnent, elles vous intriguent, elles vous ravissent ? En fait, ce sont des spaghettis à la bolognaise. Un article fait tout de suite plus sérieux avec une photo ESM.

Et l’on nous abreuve de tableaux à n’en plus finir, avec des données de mesures précisées à deux ou trois chiffres après la virgule, alors que cela n’a aucune incidence sur l’état de l’objet. De même que si vous avez 38°95 ou 39°12 de température, votre maladie sera identifiée pareillement, le médicament prescrit sera le même !
À ce niveau de précision, la donnée scientifique est inutile. Elle n’est que la traduction d’un état d’esprit, que ce soit une forme de pouvoir ou une attitude de repli : « Remettez-vous en à nous, les scientifiques. Ayez confiance, nous savons tout ! »
On voit aujourd’hui une montée de ce comportement extrêmement dangereux que j’appellerai du terrorisme scientifique. Et l’on achète des appareils coûteux qui ne servent à rien en conservation-restauration. Je vous pose la question : Qui a tenu compte des résultats d’analyses scientifiques pour mener une intervention ? [Une seule personne répond : J’ai fait une demande mais les résultats sont arrivés bien après la fin du traitement.]
La majorité des scientifiques ayant abandonné le domaine de leur responsabilité et s’étant réfugiés dans l’archéométrie, nous nous retrouvons avec un face-à-face entre le conservateur et le conservateur-restaurateur. Et au lieu de coopérer, chacun se regarde le nombril. Or, quelle différence y a-t-il entre le nombril d’un conservateur et celui d’un restaurateur ? Ils sont identiques.


1. J’utilise ce terme de conservateur-restaurateur car il a été officiellement reconnu par l’ICOM en 1983.
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