"Prochain ministre de la culture : suggèrons le programme"
C’est par ce titre que Didier Rykner égraine les réformes qu’il souhaite voir engagées par la future ministre de la culture, en dehors de tout parti pris, pour la cause patrimoniale. Mais si la liste des recommandations est longue et détaillée, tant dans le domaine des musées que du patrimoine en général, une chose m’a pourtant frappé (pour ne pas dire heurté) : les questions qui agitent le monde de la conservation-restauration n’apparaissent nulle part.
Bien sûr nombre de suggestions nous concernent comme par exemple lorsqu’il rappelle que «les monuments historiques et les musées devraient donc bénéficier de ressources financières en augmentation et sanctuarisées » ou encore lorsqu’il indique qu’il serait judicieux d’ « aider et accompagner les municipalités qui possèdent un important patrimoine religieux dans la création de plans églises dont l’objectif serait de faire un point complet de l’état de ce patrimoine immobilier et mobilier, des urgences à traiter, et la planification sur plusieurs années des restaurations à accomplir (exemple : Ville de Paris) ».
Mais comment ne pas s’étonner, alors qu’il propose de « n’autoriser que les architectes du patrimoine à intervenir sur les monuments inscrits » ou de « modifier les statuts des établissements publics en imposant que le poste de président (comme c’est le cas au Louvre ou à Orsay) soit réservé à un conservateur du patrimoine ou à une personne possédant les compétences nécessaires en histoire de l’art » qu’il n’y ait la moindre suggestion sur la qualification des restaurateurs susceptibles d’intervenir sur les objets protégés au titre des monuments historiques. Pourquoi n’y a-t-il aucune mention d’un titre protégé ou de la nécessaire réforme des marchés publics appliqués à la restauration ?
Que l’on ne se méprenne pas sur mes propos. Je n’accuse en rien l’auteur de cet article qui a su montrer en maintes occasions (et souvent de façon fort courageuse) son attachement à la cause patrimoniale en général et à la restauration en particulier (1) . J’exprime plutôt une tristesse. Comment ne pas voir là notre incapacité à faire connaître nos difficultés et plus encore à faire émerger des propositions constructives. Quand j’évoque l’impuissance des conservateurs-restateurs, je pense bien sûr à celle de nos associations représentatives mais aussi, et peut-être surtout, de nous tous, professionnels concernés. Si des oreilles aussi attentives et bien attentionnées que celle de M. Rykner ne nous entendent pas, c’est n’est pas par négligence. C’est que nous sommes encore et toujours inaudibles.
(1) Il suffit pour s’en convaincre de relire l’article sur le site de la tribune de l’Art sur « L’exception culturelle doit être appliquée à la restauration des œuvres d’art » publié le 14 février dernier.