L'avenir des réserves des musées parisiens se précise - Le Figaro, 12/12/2008
Claire Bommelaer
Le budget du futur centre sera financé grâce à l'argent qu'Abu Dhabi a versé pour l'exploitation du label Louvre
Christine Albanel s'apprête à choisir la ville qui accueillera le grand pôle de conservation du Louvre, d'Orsay et de cinq autres institutions.
Le budget du futur centre sera financé grâce à l'argent qu'Abu Dhabi a versé pour l'exploitation du label Louvre.
Où mettre les réserves des musées ? Confrontés à un risque de débordement de la Seine, sept des plus grands musées de France (et peut-être aussi Beaubourg) sont engagés depuis six mois dans un projet de centre de conservation et de réserves : entre 86 000 et 150 000 m², où non seulement sera stocké ce qui n'est pas exposé, mais où se trouvera aussi un important département de restauration. Cerise sur le gâteau, une partie de cette caverne d'Ali baba, qui ouvrira ses portes en 2013, sera accessible au public.
Pour l'instant, le Louvre, Orsay, les Arts décoratifs, l'Orangerie, l'École des beaux-arts, le Quai Branly et le Musée Picasso stockent une partie de leurs réserves dans leurs murs et une autre dans un bâtiment parisien que son propriétaire, la Caisse des dépôts, veut reprendre. De nombreux rapports ont pointé cette dispersion, ainsi qu'une gestion obsolète des réserves. « Le système implique beaucoup de transport : ce n'est pas l'idéal pour la sécurité », concède l'administrateur d'un musée. Christine Albanel a promis de prendre une décision sur le lieu d'implantation du centre d'ici à la mi-janvier : elle doit recevoir aujourd'hui un rapport d'étape pour prendre sa décision. Quinze villes avaient postulé et beaucoup (dont Versailles, Caen ou Châtillon-sur-Seine) ont été éliminées pour des raisons d'éloignement, ou parce que les communes ne souhaitaient pas s'impliquer financièrement. Le budget du centre (200 M€) sera financé grâce à l'argent qu'Abu Dhabi a versé pour l'exploitation du label Louvre, mais les musées escomptent une participation de la commune.
3 000 et 5 000 objets « hors norme »
Le Louvre compte y déménager près de 25 000 m². « Ce qui a de la valeur est accroché au mur. Mais nous avons en réserves des œuvres mineures d'écoles de grands peintres ou encore de longues séries d'objets antiques », explique-t-on au Louvre. Le Quai Branly possède entre 3 000 et 5 000 objets « hors norme » - d'immenses barques arctiques ou de grandes sculptures - destinés à partir en banlieue. Situé dans un hôtel particulier, le Musée Picasso va déplacer les 4 000 œuvres de Picasso qu'il ne peut exposer, faute de place, ainsi que les 200 000 documents d'archives (photographies ou lettres) du peintre. Les Beaux-Arts ont « énormément d'œuvres académiques » et de moulages. Les Arts décoratifs, « la totalité du fonds des Musées de la mode, et de la publicité, des céramiques, des tapisseries et des jouets anciens ».
Bref, on ne doit pas s'attendre à la « révélation » d'un Rembrandt caché jusqu'à maintenant dans une pièce sombre. Mais le public pourra voir quelques curiosités - comme une copie du portique de l'Érechthéion, un des temples de l'Acropole d'Athènes, en parfait état alors que le monument s'est dégradé, lui, au fil du temps. Des affiches ou des lettres, qui ne supportent pas une exposition prolongée à la lumière, pourront aussi être montrées occasionnellement. « Pour les chercheurs, qui aiment travailler sur des séries, le centre sera fondamental », promet Hervé Barbaret, administrateur au Louvre. Il fait ainsi valoir une collection d'ostraca (des tessons de poterie utilisés dans l'Antiquité comme support d'écriture) qui pourrait faire la joie des égyptologues du monde entier.