Chamboulements en série au ministère
Libération.fr, Culture 04/01/2010 à 00h00
Par VINCENT NOCE
Le ministère de la Culture entame sa réorganisation. Les annonces nominatives doivent commencer jeudi, mais Libération peut en révéler les premiers mouvements. C’est Philippe Bélaval, conseiller d’Etat, qui prend la tête de la direction générale des patrimoines (archives, architecture, archéologie, monuments et musées). Le choix de Frédéric Mitterrand s’est porté sur un énarque de 54 ans, manifestement choisi pour mettre de l’huile dans les rouages d’une administration un peu déboussolée.
Fusion. Sous son égide, Marie-Christine Labourdette garde la main sur les musées nationaux et sera notamment assistée de Pierre Provoyeur, conservateur général du patrimoine, à la tête d’un nouveau service, baptisé «politique muséale».
En revanche, il faudra remplacer Jérôme Clément, fin connaisseur des dossiers, qui part pour la Cour des comptes, et Martine de Boisdeffre, qui ne pourra décemment rester aux archives, après avoir tout fait pour bloquer l’absorption de sa direction dans le nouveau pôle.
La Culture comptait huit directions, plus trois délégations, comme les arts plastiques. Il n’y en aura plus que deux : celle du patrimoine, donc, et et celle du spectacle et des arts vivants (auxquelles il faut ajouter la direction des médias, côté communication). Bélaval, qui ne manque pas d’ambition, a de la chance. Nicolas Sarkozy a promis 750 millions d’euros, sur le grand emprunt, pour la numérisation de la culture. Le ministère avait déjà obtenu près de 100 millions supplémentaires chaque année pour les monuments historiques.
Pour le reste, le nouveau directeur n’aura pas trop de sa bonne connaissance du sérail. Il fut lui-même directeur général des archives, après avoir occupé le même poste à la Bibliothèque nationale et à l’Opéra de Paris. Ce Toulousain de naissance a également présidé les cours administratives d’appel de Bordeaux et de Versailles.
Secoué par les polémiques, le ministre voudrait bien renouer avec une politique de grands projets (musée des Civilisations méditerranéennes, de l’Histoire de France, palais de Tokyo, Grand Palais…) en contradiction avec la phase budgétaire.
Au rayon des dossiers rugueux, le risque d’une reprise de grève dans les grands musées est réel, les syndicats n’ayant pas démobilisé contre les suppressions de postes. D’autre part, en dépit des obstacles juridiques, Bélaval devrait relancer la décentralisation du patrimoine, pour répondre au vœu de Matignon… mais pas forcément à celui de son propre ministre. Et aussi calmer les archives, l’Institut de l’archéologie, traumatisé des allers-retours du gouvernement sur son déménagement à Reims, les laboratoires de recherches, qui ne veulent pas aller à Cergy-Pontoise, les architectes des bâtiments de France, qui se sentent toujours menacés par les élus à l’Assemblée. La fusion du Grand Palais et de la Réunion des musées nationaux reste à faire : Thomas Grenon, qui a pour lui le bilan du redressement de la RMN, va être reconduit à son poste d’administrateur, sous la présidence désormais de Jean-Paul Cluzel. Mais ce dernier a déjà fait venir Fabrice Lacroix, qui fut son directeur financier à Radio France…
Frictions. Christine Albanel attend toujours de succéder à Bruno Racine à la Bibliothèque nationale, où elle devra établir une politique face à Google, question fondamentale sur laquelle personne ne semble avoir d’idée. Sans compter les renouvellements à la tête de plusieurs grands établissements (Louvre, Versailles, Quai-Branly…), les frictions avec d’autres patrons d’établissement dont le comportement a déjà suscité la colère de Frédéric Mitterrand, et le risque de rivalités sous ses ordres. A part cela, bonne année au nouvel arrivant !
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